Raison de plus pour réfléchir aux critères d’une classe virtuelle réussie dont la création s’apparente la construction d’un immeuble. Je m’explique (après avoir témoigné dans un premier volet des diverses façons de rater une classe virtuelle)…
Pour construire une classe virtuelle, il faut des matériaux, du matériel et de l’humain…
Matériaux
Les matériaux nous ramènent à la formation présentielle dont toutes les ressources pédagogiques sont utilisables en classe virtuelle : exposé de l’animateur en Visioconférence, utilisation de diaporama, travail sur cas concret, quiz, travail en sous groupe, intervention des apprenants… Sous réserve !
Il est en effet nécessaire d’aménager ces solutions.
Exemple 1 : le diaporama. En salle, les diapos sont souvent commentées / enrichies par le formateur « au paper board », alors que l’animateur d’une classe virtuelle est vissé à son fauteuil. Pour simuler le paper board, l’animateur doit être doté d’une tablette graphique et d’un stylet. Par ailleurs, les diapos devront être totalement revisitées en matière de « motion design » pour être digérées en classe virtuelle.
Exemple 2 : le cas concret. Un cas concret technique peut nécessiter qu’on distribue en salle une liasse de plusieurs documents. L’affichage de ces liasses, lors d’une classe virtuelle, peut constituer un obstacle à l’apprentissage. Le cas concret devra, lui aussi, être revu ; il devra garder sa cohérence globale tout en étant découpé en courtes séquences quasiment autonomes.
On sait (par les neurosciences et la pratique) que l’attention apprenante baisse au bout de 10 minutes. C’est vrai en salle… et plus encore à distance ! Le patron d’une station de radio bien connue a un jour affirmé qu’il fallait relancer l’attention de l’auditeur toutes les trois minutes. En classe virtuelle, cette relance s’apparente sans doute plus à 3 minutes qu’à 10.
Notons que des formats pédagogiques rarement utilisés en salle - recherche sur Internet, consultation de séquences e-learning, etc. - ont tous leur place dans une classe virtuelle, et qu’elles peuvent servir de support à des travaux en sous groupes avant restitution en plénière. Notons aussi que la consultation de capsules sur une plate-forme LMS offre l’avantage complémentaire de la traçabilité de la présence réelle des apprenants.
Matériel
Comme sur un chantier de construction, un matériel défaillant peut conduire à l’échec. Les plateformes de visioconférence ne sont absolument pas adaptées à la construction / diffusion de véritables classes virtuelles qui nécessitent bien d’autres fonctionnalités : vidéos et son (possibilité pour l’animateur d’activer / désactiver ces fonctionnalités pour les apprenants), sondage, partage d’écran, y compris celui d’un apprenant, paper board, connexion Internet pour les apprenants, connexion à un LMS, création de sous-groupes / ateliers, possibilité pour l’animateur de naviguer dans les ateliers, tchat…
Dans une récente expérience récente, aucun des apprenants ne disposait d’une caméra, un seul disposait d’un micro ; l’espace réservé au tchat mangeait 20% de l’écran, les 80 % restant étaient occupés par des vignettes sans image avec le nom du participant ! Comment dès lors réussir sa classe virtuelle ?
Le sondage fournit un autre exemple de ce qui est nécessaire dans toute solution de classe virtuelle : cette fonctionnalité doit être un produit complet, formaté, donnant des résultats instantanément, et non une procédure compliquée à construire dans le diaporama.
Peu de solutions de classe virtuelle répondent à ces exigences, parmi elles : Adobe Connect, Webex et Classilio, chacune avec ses avantages et ses inconvénients. Il existe d’autres, sans doute !
Le facteur humain
Hors les apprenants, la réussite d’une classe virtuelle repose sur 3 « acteurs » : le formateur, le responsable formation et la direction du système d’information.
Pour prolonger l’analogie avec le secteur de la construction… Le formateur, c’est l’entreprise en charge du lot « tous corps d’état » : à partir du plan masse et de la maquette, il élabore les plans d’exécution les plus détaillés possibles : l’alternance des rythmes et des solutions pédagogiques figurent dans un script extrêmement précis.
Le service formation n’est pas qu’un maître d’ouvrage, il doit aussi s’impliquer dans la maîtrise d’œuvre, pour éviter les oukases du premier confinement : le présentiel est impossible à reporter, il faut le transposer directement en classe virtuelle, comme d'un coup de baguette magique !
En tant que maître d’œuvre, le responsable formation pourra intervenir dans les champs suivants : volumétrie des groupes (de 14 en salle à 2 × 7 en classe virtuelle) ; durée des classes (2 h 30, c’est le maximum, qui équivaut à 3 h 30 en salle) ; période calendaire sur laquelle les classes seront étalées ; moyens techniques et environnement (poste de travail de l’apprenant, poste dédié, centre ressources, poste personnel de l’apprenant à domicile) ; qualité des connexions…
Quant à la DSI, c’est un peu l’équivalent, toujours dans le secteur de la construction, des services techniques de la ville qui doivent vérifier la qualité des infrastructures, l’emplacement des réseaux… voire d’y apporter des modifications temporaires si le constructeur a besoin d’acheminer des matériels lourds ou des capacités de levage exceptionnelles dans le cadre de son chantier. En effet, c’est à la DSI qu’il appartient de vérifier si telle ou telle solution de classe virtuelle s’intègre bien dans l’écosystème informatique ou avec les postes apprenants, si tel outil pédagogique voulu par le formateur requiert des connexions Internet, l’utilisation de la vidéo, l’intégration avec la plate-forme LMS dont la DSI possède en général les clés. La DSI peut se révéler d’un précieux conseil dans l’expression des besoins du formateur.
D’un confinement à l’autre :
Le premier confinement avait généralisé les classes virtuelles « par défaut ». Au moment où le deuxième démarre, il n’est que temps de revenir sur la conception du format « classe virtuelle » !
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